Jonas

Le livre de Jonas pose de nombreuses questions.

Son auteur serait selon (Jon 1,1) et (2 R 14,25) le prophète Jonas fils d’Amittaï qui, au temps de Jéroboam II (il serait donc contemporain de Amos et Osée) pouvait encore, après la purge opérée au Nord comme au Sud par Jéhu contre le Baal (2 R 9-10) et dans l’euphorie de la reconquête, prophétiser contre Amos une conversion éventuelle de l’Assyrie (qui n’avait pas encore Ninive comme capitale). L’avenir lui avait donné tort et on avait cessé de parler de lui. Il est cité par le Siracide dans les douze petits prophètes, à peu près à sa place dans le temps, après Amos son quasi contemporain et opposant.

Le livre de Jonas dans la Bible semble reprendre l’héritage de ce prophète à une époque qui semblait lui donner raison. 

Le contenu du livre nous oriente alors vers un récit bien plus tardif.  Il semble une œuvre littéraire de type conte grec avec un style fleuri de légendes fantastiques dont la baleine fait partie. Son auteur, appelé lui aussi Jonas (de Ionah/la colombe) n’a gardé que la valeur symbolique du mot « colombe » qui chez son contemporain Osée signifie « le peuple rentrant d’Exil » (Os 7,11) ; (Os 11,11). Effectivement le livre est postexilique et même postérieure à Alexandre (-330) et à la division entre Lagides et Séleucides, lesquels s’étaient partagés l’empire d’Alexandre et avaient entrainé Israël successivement chez les Lagides de Ptolémée, puis après la bataille de Panias en -201 (Antiquités juives 12,133-146) chez les Séleucides d’Antiochus III. Comme le note Flavius Josèphe, les juifs ont montré un grand empressement à servir Antiochus III, d’où une période euphorique où l’on pouvait croire arrivé le temps de la paix annoncée par (Is 19,23-25) :
« Ce jour-là, il y aura une route allant d’Egypte vers l’Assyrie, Assur viendra en Egypte et l’Egypte en Assyrie. L’Egypte servira Assur. Ce jour-là Israël, le troisième avec l’Egypte et Assur sera béni au milieu de la terre. YHWH Sabaoth le bénira en disant : Béni soit mon peuple d’Egypte, Assur l’œuvre de mes mains et Israël mon héritage ». (Même écho, approximativement à la même date dans (Za 14,18-21)).

Il est clair qu’à la suite de la découverte du monothéisme d’Amour en opposition à celui de la lumière (Mazda) pratiqué par les Perses, puis au contact de l’hellénisme en Egypte qui a amené les juifs à penser la Torah comme pouvant rivaliser avec la Sagesse des grecs, un souffle d’universalité a réveillé l’espérance d’Israël. 

On comprend mieux comment est rédigé le livre de Jonas.

1. Ninive capitale de l’Assyrie a été détruite en (-622) par la victoire des Mèdes. Parler de sa conversion ne peut donc se faire au sens propre. Elle est devenue l’emblème mythique d’une cité hellénistique avec son roi qui se convertit à la Parole du prophète.

2. Jonas (la colombe/Israël) appelé par Dieu s’enfuit. Il est en Egypte et s’enfuit à Tarsis ville du sud de l’Espagne, le point extrême de l’occident connu alors. Une tempête orchestrée par Dieu (qui la fait cesser quand il veut) procure à Jonas une baleine comme canot de sauvetage. Celle-ci l’amène à Ninive qui n’est pas un port, même pour une baleine, mais le point extrême de l’orient connu alors.

3. Ninive se convertit à la prédication du prophète.

4. Hélas l’arbre de vie (le roi) qui donnait du repos au prophète se dessèche (Antiochus III est remplacé par Antiochus IV Epiphane qui fera la première persécution religieuse du peuple juif en -167).

5. Une fois encore le prophète Jonas s’est trompé. Il n’a plus que ses yeux pour pleurer. Dieu a fait miséricorde aux païens.

Les publications de référence :

Les Seuils de la Foi

Editions Parole et Silence et Université Catholique de Lille

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