Processus sociologique des phénomènes d'immigration

Le phénomène d'assimilation/rejet appliqué aux tribus en immigration ressort du principe des sociétés segmentaires de Durkheim. Ce sont des tribus qui n'ont aucune structure commune mais sont capables de faire la guerre ensemble dès que le caractère identitaire est menacé. Les raisons de cette guerre vont donc dépendre du caractère identitaire mis en évidence. 

Selon Gotwald, ce qui était essentiel à ces tribus et constituait leur caractère identitaire c'est le réflexe président à la révolution du prolétariat. Les tribus pauvres se seraient révoltées contre les riches cananéens. L'idéologie est dépassée mais le principe d'assimilation rejet reste valable à partir d'un autre caractère identitaire à sauvegarder : la dévotion à un Dieu du désert pourvoyeur de tout ce qui fait la vie, affronté à une religion de fécondité agraire de type féodal, en perte de vitesse. (Liverani BIH, pages 52 à 56 et 70 à 82)

Selon Alexandre Ghanem (responsable de la Police d'intégration de Lille-Roubaix et président de la délégation de Lille de l'association Police et Humanisme. Communauté Chrétienne des policiers de France):


"Le double prix de l’intégration"

"L’intérêt du regard porté ici sur la problématique de l’étranger réside dans le fait qu’il émane d’un fonctionnaire de police lui-même fils d’immigrés, et qui vit concrètement les implications relationnelles et humaines d’une appartenance culturelle multiple.

Un défi accentué pour la « seconde génération »
Les phénomènes migratoires sont comparables à des relations de couple, en ce sens que les deux partenaires développent  attentes et craintes symétriques, dans un climat parfois passionnel.
Il n’y a de migration que douloureuse ; nul ne quitterait son pays s’il pouvait y vivre. C’est un départ pour le rêve. Suit la période d’adaptation à la réalité, où l’immigré se fait discret.
L’immigré éprouve jusque dans sa chair ce mécanisme décrit par un éminent bibliste, le P. Jacques Bernard : l'assimilation/rejet. Pour faire simple, une société d'accueil accepte l'immigré à la condition que celui-ci se fonde dans la masse ; de son côté, l'immigré joue le jeu tant qu’il n’est pas porté atteinte aux points les plus sensibles de son identité culturelle et cultuelle d'origine ; par exemple les interdits alimentaires, la place de la femme...  Les blocages concernent davantage la deuxième génération, observatrice d’autant plus critique – et parfois injuste - du sort réservé à ses pères, qu’elle se voit à la fois étrangère au pays d’origine et au pays d’accueil.
Pour vivre, un minoritaire doit survivre : en d’autres termes, pour qu'un indigène considère un allogène comme son égal, cet allogène doit manifester son excellence. L’enjeu, pour l’allogène, sera de se faire une place sans faire peur au « natif ». 
En outre, autant que l’origine ethnique, c’est l’aisance et la richesse qui constituent un facteur d’intégration sociale.
De surcroît, il va de soi qu’une immigration légale sera plus facile à vivre tant pour le migrant que pour le natif.

Un défi à « l’entre-soi » des populations installées 
L’indigène, par le fait migratoire, s’aperçoit qu’il n’est pas seul au monde ; la présence de l’autre est toujours déstabilisante, surtout lorsqu’il ne s’agit plus d’individualités mais de groupes entiers, certains ayant un rapport ambigu à la loi. C’est la crainte de l’invasion. « Comment peut-on être Persan ? » notait Montesquieu. « Vais-je perdre ma place si l’étranger fait la sienne ?  Je suis davantage chez moi que lui ! » pense plus prosaïquement  le natif qui observe : « d’ailleurs, ils ne vivent pas comme nous ! » De là naissent des craintes, des exacerbations difficiles à juguler.
Le contact des deux univers s’effectue notamment à l’école. Sur cet aspect, je recommande vivement le livre de M. Gérard NOIRIEL : LE CREUSET FRANCAIS - Histoire de l'immigration XIX°-XX° siècle Éditions du Seuil, Collection Points – Histoire

Elargir notre exigence de justice aux dimensions du « village planétaire »
La mondialisation et son corollaire humain que sont les flux migratoires supposent, pour  être vécus harmonieusement, le partage dans la justice. Si les crispations sont minimes en période de prospérité économique, c’est en période de marasme que surgissent les blocages identitaires, les tentations totalitaires, voire du terrorisme, ou les crises dites des « banlieues » ou du « foulard ».  Toujours l’homme changea de  pays. En se constituant, les cités puis les Etats tentèrent d’y mettre bon ordre ; ainsi l'empereur romain Marc Aurèle décréta que tous les barbares qui vivaient sur le sol de l'Empire pourraient bénéficier des mêmes droits et prérogatives que les citoyens romains, mais à la double prescription impérative qu'ils ne s'habillent que de la toge et respectent strictement les lois et coutumes romaines et nulles autres. C'est de là qu'est né l'adage : à Rome, fais comme les Romains !"
 (Alexandre Ghanem)

Père Jacques Bernard, Décembre 2013

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